2011

Mise en mots d’un événement historique : Approche discursive et interactionnelle de la chute de l’URSS dans des récits de vie de migrants russophones

Sandra NOSSIK

Thèse de linguistique soutenue par Sandra NOSSIK le 24 novembre 2011 sous la direction de Christine DEPREZ à l’université Paris Descartes.

Contact : sandra.nossik chez gmail.com

Résumé

Ce travail se propose d’examiner comment la chute de l’URSS est mise en mots dans des histoires individuelles : les discours institutionnels sur les événements politiques sont réappropriés par les récits biographiques, qui, par des points de vue et des verbalisations différentes, contribuent eux-mêmes à créer l’Histoire.

Cette recherche s’inscrit dans le cadre disciplinaire de la sociolinguistique interactionnelle et de l’Analyse du Discours. Son corpus est composé d’une vingtaine d’entretiens réalisés en russe auprès de migrants récemment arrivés en France, et issus de toutes les républiques post-soviétiques.

La première partie de la thèse offre une réflexion théorique sur la notion d’événement, ainsi que sur la mise en intrigue que sont les récits de vie. Cette partie est également l’occasion d’une réflexion épistémologique sur l’usage des récits de vie en sociolinguistique par comparaison aux autres sciences sociales.

La seconde partie offre une analyse discursive de la chute de l’URSS telle qu’elle est mise en mots dans les récits de vie. 1991 s’avère être un repère temporel partagé dans les récits, verbalisé sous la forme d’une rupture tant narrative à l’échelle des récits que discursive. Sont analysées en particulier la structure des récits, les temporalités affectives qui les déterminent, les dénominations d’événements employées et leur caractère dialogique, ainsi que les catégorisations de la sphère du pouvoir politique.

La troisième partie de la thèse est consacrée à la dimension interactionnelle des récits de vie co-construits dans la situation d’entretien. Ce point de vue permet d’analyser les catégorisations réciproques des interactants, et leurs conséquences sur les contenus implicites des récits. Ces analyses conduisent à une réflexion sur le rôle du chercheur et la performativité du genre de discours qu’est le témoignage.

Ce travail éclaire ainsi la façon dont les discours autobiographiques à la fois s’emparent et se distancient des discours institutionnels, mettant en intrigue l’Histoire en même temps que leur propre histoire, et octroyant sens et postérité aux événements politiques vécus. Cette recherche constitue également une proposition d’approche sociolinguistique du corpus que sont les récits de vie, et une réflexion interdisciplinaire sur les notions de témoignage et d’événement historique.

Mots-Clés

Analyse du discours, sociolinguistique, récit, interaction, dialogisme, migrations, événement, russe, URSS, Russie, Europe de l’Est, Caucase, France.