Séminaires de l’axe 1

La gestion des patients de retour en consultation à l’issue d’une rupture de suivi médical : examen des pratiques et identification de leurs limites

13 mars 2012
14h-17h
La gestion des patients de retour en consultation à l’issue d’une rupture de suivi médical : examen des pratiques et identification de leurs limites
Séminaires de l’axe 1
@ CEPED

19 rue Jacob
75006 Paris

Invitée : Séverine Carillon

Le retour en consultation des personnes vivant avec le VIH (PVVIH) après une rupture de suivi médical de plusieurs mois consécutifs constitue une opportunité pour les soignants de réinsérer les patients dans un processus de soins régulier et durable. Décrire et analyser les discours et pratiques des soignants mis en place à cet effet est l’objectif de cette présentation. Il s’agira de montrer comment certaines pratiques visant à enrayer l’inobservance des PVVIH peuvent au contraire contribuer à reproduire ces comportements d’inobservance.

Les données proviennent d’une enquête anthropologique menées à Kayes, en 2008-2009. Un travail d’observation en milieu hospitalier et associatif a été conduit. Des entretiens individuels ont été réalisés auprès de PVVIH (24) ayant interrompu le suivi de leur infection à un moment donné et de soignants (8) impliqués dans la prise en charge des PVVIH à l’hôpital de Kayes.

Cette recherche permet de mettre en exergue une gestion différentielle des patients selon le jugement que les soignants se font des origines des ruptures de suivi de ces individus, plus que selon les difficultés rencontrées par ces derniers. Certaines ruptures considérées comme illégitimes suscitent ainsi l’adoption par les soignants d’une posture autoritaire. Un processus complexe de persuasion des patients est alors amorcé. Divers arguments pour « faire pression » sur les patients sont mobilisés. Un système de surveillance est mis en place de façon à ce que les patients adoptent les comportements requis. La pression à la conformité par l’instauration de pratiques punitives compromet l’instauration d’un dialogue entre les individus. Les difficultés des PVVIH sont ainsi renforcées par l’imposition de pratiques conçues indépendamment de l’expérience des patients.

Le retour en consultation de ces PVVIH s’apparente ainsi à un processus coercitif d’assimilation visant à maintenir les patients dans un système normatif plus qu’à un processus d’accompagnement des PVVIH dans une démarche de soin. Le glissement ainsi opéré favorise le maintien des PVVIH dans une position de domination sociale qui accroit leur vulnérabilité face au suivi de leur infection.

Abstract présenté lors de la 6e Conférence Francophone sur le Sida, Genève, mars 2012.