2016

Nuptialité et processus matrimonial chez les Dagara du Burkina Faso. Permanence et évolutions.

François PALM

Thèse de Démographie soutenue le 30 novembre 2016 par François PALM sous la direction de Yves CHARBIT à l’université Paris-Descartes.

Résumé du projet de thèse

La région du Sud Ouest du Burkina est l’une des trois les plus pauvres du pays. Outre les taux brut de scolarisation et d’alphabétisation qui sont en dessous de la moyenne nationale, elle a un taux de ruralité qui est estimé à près de 88%. Paradoxalement, les indicateurs de la nuptialité sont plus proches de ceux des régions du Centre et des Hauts Bassins où se trouvent respectivement la capitale Ouagadougou et Bobo Dioulasso, la deuxième ville du pays.

Comment comprendre et expliquer ces données statistiques qui semblent contredire les évidences des théories démographiques de la modernisation socio-culturelle et de l’impact de la scolarisation sur l’âge moyen et médian au mariage ? De prime abord, les déterminants socio-économiques ne paraissent pas assez pertinents pour aider à comprendre les raisons du niveau des taux des indicateurs de la nuptialité dans cette région rurale, pauvre et ayant un faible niveau de scolarisation.

Face à cette aporie, il convenait de trouver une alternative théorique et méthodologique pour mettre en lumière les facteurs déterminants de cette situation apparemment paradoxale. D’où le recours à la théorie du changement et des réponses et à l’approche de la démographie compréhensive qui prend davantage en compte les facteurs socio-culturels en tant qu’ils sont perçus par les acteurs eux-mêmes. Dans cette optique, un travail d’interdisciplinarité s’impose dans la mesure où les indicateurs statistiques ne sont intelligibles que par la médiation d’une herméneutique socio-anthropologique. La fécondité d’une telle entreprise heuristique passe nécessairement par la conjugaison des approches quantitatives et qualitatives. Il s’agit de concilier la démographie et la socio-anthropologie en étant attentif à trois échelles d’observation : macrosociale, mesosociale et microsociale. Si l’échelle macrosociale fait apparaître les données statistiques, les dimensions meso et micro-sociale permettent de décrypter la rationalité des acteurs, d’une part, et de discerner les tensions pouvant exister la société Dagara et l’institution étatique ou ecclésiale, d’autre part.

Dans cette perspective, l’un des facteurs socio-culturels qui est susceptible de jouer un rôle déterminant dans la nuptialité chez les Dagara serait le processus matrimonial notamment la pratique de la compensation matrimoniale. Malheureusement, celle-ci est une variable qui est occultée dans les questionnaires du recensement alors qu’elle occupe une place primordiale dans les contrats et transactions matrimoniaux dans de nombreuses aires socio-culturelles du Burkina.

C’est en vue d’élucider cette problématique que j’ai choisi d’analyser le processus matrimonial chez les Dagara dont la compensation matrimoniale semble être le socle des lignages et la clef d’intelligibilité de l’organisation sociale. Le choix des Dagara est motivé par le fait qu’ils représentent près de 38% de la population du Sud Ouest, constituent un groupe socio-culturel homogène. Par ailleurs, une étude de 1976 montrait déjà qu’ils se distinguaient des autres ethnies en présence dans le sud ouest à cause de l’influence du christianisme.

Enfin, la conversion de nombreux ménages au christianisme dès la première moitié du 20e siècle est un changement majeur dans la société Dagara qui pourrait influencer fortement le processus matrimonial. L’Eglise a dû imposer ses normes matrimoniales. Un autre changement qui est intervenu sur le plan national est celui de l’adoption du code de la famille et des personnes Burkinabè depuis 1985. Celui-ci stipule entre autres que le versement de toute dot est illégal. Les normes matrimoniales de l’Eglise Catholiques, le code des personnes et de la famille du Burkina sont des facteurs exogènes de changement par rapport aux us et coutumes Dagara du mariage. Quelles sont les réponses individuelles ou collectives face à ces changements ? Quelle est l’incidence de ces changements sur l’âge au mariage, la filiation et les composantes de la compensation matrimoniale ? Quelle est l’impact de ces changements sur le processus matrimonial et la nuptialité ?

Mots-Clés

Culture, nuptialité, parenté, migration, indicateurs, compensation matrimoniale, échelles d’observation.

Zone géographique

Burkina Faso