Thèse de Recherche sur les services de santé publique soutenue par Keitly MENSAH sous la direction de Alexandre DUMONT à l’Université de Paris, le 5 novembre 2021, en (visio)
Axe de recherche au Ceped : Axe 1 - Santé, vulnérabilités et relations de genre au Sud
Résumé
En Afrique subsaharienne, la prévention du cancer du col de l’utérus (CCU) repose essentiellement sur l’inspection visuelle après coloration à l’acide acétique (IVA). Le recours à la détection des papillomavirus humains à haut risque oncogène (test HPV) en première intention pourrait améliorer la performance du dépistage, mais le succès de son introduction dans des systèmes de santé fragiles et en développement reste incertain. L’objectif général de cette thèse était d’évaluer les stratégies de mise en œuvre du dépistage opportuniste par test HPV primaire au sein de trois formations sanitaires : un centre prenant en charge les femmes vivant avec le VIH en Côte d’Ivoire et deux centres de santé primaire à Ouagadougou au Burkina Faso.
Une recherche formative initiale a été réalisée pour évaluer les freins et les leviers potentiels à la mise en œuvre du test HPV et adapter la stratégie à chaque contexte. Puis une étude hybride multi-sites d’efficacité et de mise en œuvre a été menée afin d’explorer les déterminants de la complétude du dépistage (réalisation d’un test de triage et d’un traitement si nécessaire) et de la satisfaction des participantes à l’égard de leur prise en charge. Une approche mixte quantitative et qualitative a été utilisée.
Le dépistage par test HPV a pu être intégré avec succès aux activités de routine des différents centres participants. Le taux de complétude dépassait 80% bien que la prise en charge des femmes non éligibles à un traitement sur place et adressées vers d’autres structures ait été le plus souvent incomplète. Au Burkina Faso, une minorité de femmes a pu être dépistée et traitée le même jour lorsque cela s’avérait nécessaire. Toutefois, la compréhension des informations délivrées par les soignants, l’usage de l’auto-prélèvement ainsi que les temps d’attentes réduits augmentaient la complétude du dépistage et la satisfaction des participantes. En Côte d’Ivoire, toutes les femmes éligibles ont été dépistées et traitées le même jour comme l’exigeait le protocole de recherche. Mais les temps d’attente associés, jugés trop long par les soignants, n’étaient pas compatibles avec une intégration pérenne de ce type de dépistage dans l’offre de soins. Par ailleurs, les patientes étaient d’autant plus satisfaites qu’elles avaient confiance en l’auto-prélèvement et que le diagnostic de séropositivité au VIH était ancien. Les patientes dépistées positives et traitées avaient plus de chance d’être suivie à 12 mois lorsqu’ elles étaient âgées, bien informées et avaient eu une visite intermédiaire. Mais l’annonce du résultat générait parmi les femmes HPV positives une anxiété qui pourrait avoir un impact négatif sur le suivi à un an.
Mettre en place un dépistage par test HPV au sein des centres de santé s’avère faisable dans des contextes à ressources limitées. Une approche « dépister et traiter » en deux temps semble la plus adaptée et bien acceptée par les femmes vivant en milieu urbain. Les futurs programmes devraient mettre l’accent sur l’auto-prélèvement, la communication des résultats, la réduction des temps d’attente, l’accompagnement psychologique des femmes dépistées HPV positives et l’intégration du dépistage dans la charge de travail du personnel de santé.
Mots-Clés
Cancer du col de l’utérus, dépistage, test HPV, étude hybride, mise en œuvre
Zone géographique
Afrique sub-saharienne, Côte d’Ivoire, Burkina Faso
Jury
- DUMONT Alexandre, DR, IRD, Directeur de thèse
- DEBEAUDRAP Pierre, Chargé de recherche, IRD, co-encadrant
- Marc Bardou, PU-PH, Université de Bourgogne, rapporteur
- GAUTIER Lara, Professeur Adjointe à l’École de Santé Publique de l’Université de Montréal, rapporteure
- Apollinaire Horo, PU-PH, Université d’Abidjan, examinateur
- Linda Cambon, Enseignante-Chercheure, Université de Bordeaux, examinateur
- Rosa Catarino, Gynécologue, Hôpitaux Universitaires de Genève, invitée