2019

L’accès à la césarienne dans différents contextes de financement des soins de santé maternelle en Afrique de l’Ouest

Marion RAVIT

Thèse de Santé Publique (Epidémiologie) soutenue le 24 juin 2019 par Marion Ravit sous la direction de Alexandre Dumont à l’université UPMC (Université Pierre et Marie Curie).

Résumé de la thèse

En Afrique subsaharienne, seules 3% des femmes accouchent par césarienne, ce qui est bien en dessous du taux minimum de 5% recommandé pour couvrir tous les besoins obstétricaux. En plus d’être insuffisant, l’accès à la césarienne dans cette sous-région est inégal puisque ce sont les femmes les plus riches et celles qui vivent en milieu urbain qui en bénéficient le plus. Le Mali et le Bénin ont introduit une politique de gratuité ciblant les césariennes, respectivement en 2005 et 2009. Les femmes enceintes continuent de payer pour se faire soigner, mais, en cas de césarienne, leurs soins sont gratuits. En Mauritanie, avec le soutien de l’Agence Française de Développement, un forfait obstétrical a été mis en œuvre progressivement depuis 2002, il permet aux femmes d’accéder à tous les soins durant la grossesse et l’accouchement, y compris la césarienne, contre le paiement d’une prime d’environ quinze euros. Cette thèse cherche à savoir si ces différentes réformes permettent réellement d’améliorer l’accès aux soins obstétricaux des femmes enceintes en général et à la césarienne en particulier.
Les politiques étudiées ici ont été mises en place dans les années 2000 sans processus spécifique d’évaluation. Nous avons utilisé des données existantes (enquêtes démographiques et de santé et enquêtes à indicateurs multiples), représentatives de la population au niveau national et des méthodes quasi-expérimentales pour évaluer l’impact de ces réformes sur les taux d’utilisation des services de santé maternelle et néonatale. Nous avons également évalué les effets de ces politiques sur les inégalités de santé en comparant l’utilisation de la césarienne comme mode d’accouchement entre différents groupes de femmes, selon leur zone de résidence (urbain/rural), leur niveau d’éducation et leur niveau de richesse.
La première partie de cette thèse montre que l’utilisation des services de santé pour l’accouchement et la césarienne a été améliorée au Mali et au Bénin où la gratuité de la césarienne a été mise en place, comparativement à des pays sans ce type de réforme. En revanche, la gratuité de la césarienne n’a pas eu d’effet sur les inégalités de santé en ce qui concerne l’accès à la césarienne. La deuxième partie de la thèse montre que le forfait obstétrical en Mauritanie a permis une amélioration de l’utilisation des services de santé pour les femmes enceintes, sans cependant avoir eu d’effet sur les taux globaux de césarienne. Néanmoins, des effets sur les inégalités de santé sont à noter.
Les résultats de cette thèse renforcent l’idée que les paiements directs des soins dans les formations sanitaires en Afrique subsaharienne constituent une barrière importante qui limite l’accès des femmes enceintes aux services de santé en général et à la césarienne en particulier. En revanche, il est important que les gouvernements se tournent désormais vers des mécanismes promouvant l’universalisme proportionné pour assurer un accès équitable aux soins de santé. Il est primordial que ces réformes, mises en œuvre depuis plus de dix ans, soient évaluées et que les décideurs aient pleinement connaissance de leurs effets afin d’assurer aux femmes enceintes un accès optimal aux soins et ainsi réduire la mortalité maternelle.

Mots-Clés
Bénin, Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Santé de la reproduction, Santé publique, Afrique sub-saharienne, Inégalités, Systèmes de santé

Zone géographique
Afrique Sub-saharienne, Bénin, Mali, Mauritanie.

Publications


  • Dumont Alexandre, de Loenzien Myriam, Schantz Clémence et Ravit Marion (2017) « CESARIA - un programme de recherche interventionnelle sur la pratique de la césarienne dans le monde » présenté à Journées de la recherche en santé publique, Paris. https://www.f2rsmpsy.fr/journees-recherche-sante-publique.html.
  • Ravit Marion (2019) « L’accès à la césarienne dans différents contextes de financement des soins de la santé maternelle en Afrique de l’Ouest », Thèse de doctorat en santé publique, option épidémiologie, Paris : Université Paris Descartes, 266 p.
    Résumé : En Afrique Sub-Saharienne, seules 3% des femmes accouchent par césarienne, ce qui est bien en-dessous du taux minimum de 5% recommandé pour couvrir tous les besoins obstétricaux. En plus d’être insuffisant, l’accès à la césarienne dans cette sous-région est inégal puisque ce sont les femmes les plus riches et celles qui vivent en milieu urbain qui en bénéficient le plus. Le Mali et le Bénin ont introduit une politique de gratuité ciblant les césariennes, respectivement en 2005 et 2009. Les femmes enceintes continuent à payer pour se faire soigner, mais, en cas de césarienne, leurs soins sont gratuits. En Mauritanie, avec le soutien de l’Agence Française de Développement (AFD), un forfait obstétrical a été mis en œuvre progressivement depuis 2002, permettant aux femmes d’accéder à tous les soins durant la grossesse et l’accouchement, y compris la césarienne, contre le paiement d’une prime d’environ 15 euros. Cette thèse cherche à savoir si ces différentes réformes permettent réellement d’améliorer l’accès des femmes enceintes aux soins obstétricaux en général et à la césarienne en particulier.Retour ligne automatique Les politiques étudiées ici ont été mises en place dans les années 2000 sans processus spécifique d’évaluation. Nous avons utilisé des données existantes (Enquêtes démographiques et de santé et enquêtes à indicateurs multiple), représentatives de la population au niveau national et des méthodes quasi-expérimentales pour évaluer l’impact de ces réformes sur les taux d’utilisation des services de santé maternelle et néonatale. Nous avons également évalué les effets de ces politiques sur les inégalités de santé en comparant l’utilisation de la césarienne comme mode d’accouchement entre différents groupes de femmes, selon leur zone de résidence (urbain/rural), leur niveau d’éducation et leur niveau de richesse.Retour ligne automatique La première partie de cette thèse montre que l’utilisation des services de santé pour l’accouchement et la césarienne a été amélioré au Mali et au Bénin où la gratuité de la césarienne a été mise en place, comparativement à des pays sans ce type de réforme. En revanche, la gratuité de la césarienne n’a pas eu d’effet sur les inégalités de santé en ce qui concerne l’accès à la césarienne. La deuxième partie de la thèse montre que le forfait obstétrical en Mauritanie a permis une amélioration de l’utilisation des services de santé pour les femmes enceintes, sans cependant avoir eu d’effet sur les taux globaux de césarienne. Néanmoins, des effets sur les inégalités de santé sont à noter.Retour ligne automatique Les résultats de cette thèse renforcent l’idée que les paiements directs des soins dans les formations sanitaires en Afrique sub-saharienne constituent une barrière importante qui limite l’accès des femmes enceintes aux services de santé en général et à la césarienne en particulier. En revanche, il est important que les gouvernements se tournent désormais vers des mécanismes promouvants l’universalisme proportionné pour assurer un accès équitable aux soins de santé. Il est primordial que ces réformes, mises en œuvre depuis plus de dix ans, soient évaluées et que les décideurs aient pleinement connaissance de leurs effets afin d’assurer aux femmes enceintes un accès optimal aux soins et ainsi réduire la mortalité maternelle.


  • Ravit Marion, Audibert Martine, Ridde Valéry, de Loenzien Myriam, Schantz Clémence et Dumont Alexandre (2018) « Do free caesarean section policies increase inequalities in Benin and Mali? », International Journal for Equity in Health, 17 (1) (décembre), p. (art 71, 12 p.). DOI : 10.1186/s12939-018-0789-x. https://equityhealthj.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12939-018-0789-x.


  • Ravit Marion, Audibert Martine, Ridde Valéry, de Loenzien Myriam, Schantz Clémence et Dumont Alexandre (2018) « Removing user fees to improve access to caesarean delivery: a quasi-experimental evaluation in western Africa », BMJ Global Health, 3 (1) (janvier), p. e000558 (11 p.). DOI : 10.1136/bmjgh-2017-000558. http://gh.bmj.com/lookup/doi/10.1136/bmjgh-2017-000558.
    Résumé : Introduction Mali and Benin introduced a user fee exemption policy focused on caesarean sections in 2005 and 2009, respectively. The objective of this study is to assess the impact of this policy on service utilisation and neonatal outcomes. We focus specifically on whether the policy differentially impacts women by education level, zone of residence and wealth quintile of the household. Methods We use a difference-in-differences approach using two other western African countries with no fee exemption policies as the comparison group (Cameroon and Nigeria). Data were extracted from Demographic and Health Surveys over four periods between the early 1990s and the early 2000s. We assess the impact of the policy on three outcomes: caesarean delivery, facility-based delivery and neonatal mortality.

  • Ravit Marion, Philibert Aline, Tourigny C., Traore Mamadou, Coulibaly A., Dumont Alexandre et Fournier Pierre (2015) « The hidden costs of a free caesarean section policy in West Africa (Kayes region, Mali) », Maternal and Child Health Journal, 19 (8), p. 1734-1743. DOI : 10.1007/s10995-015-1687-0.
    Résumé : The fee exemption policy for EmONC in Mali aims to lower the financial barrier to care. The objective of the study was to evaluate the direct and indirect expenses associated with caesarean interventions performed in EmONC and the factors associated with these expenses. Data sampling followed the case control approach used in the large project (deceased and near-miss women). Our sample consisted of a total of 190 women who underwent caesarean interventions. Data were collected from the health workers and with a social approach by administering questionnaires to the persons who accompanied the woman. Household socioeconomic status was assessed using a wealth index constructed with a principal component analysis. The factors significantly associated with expenses were determined using multivariate linear regression analyses. Women in the Kayes region spent on average 77,017 FCFA (163 USD) for a caesarean episode in EmONC, of which 70 % was for treatment. Despite the caesarean fee exemption, 91 % of the women still paid for their treatment. The largest treatment-related direct expenses were for prescriptions, transfusion, antibiotics, and antihypertensive medication. Near-misses, women who presented a hemorrhage or an infection, and/or women living in rural areas spent significantly more than the others. Although abolishing fees of EmONC in Mali plays an important role in reducing maternal death by increasing access to caesarean sections, this paper shows that the fee policy did not benefit to all women. There are still barriers to EmONC access for women of the lowest socio-economic group. These included direct expenses for drugs prescription, treatment and indirect expenses for transport and food.
    Mots-clés : caesarean section, EmONC, Expenses of care, Fee exemption, Maternal health, West Africa.

  • Ravit Marion, Schantz Clémence, de Loenzien Myriam, Dumont Alexandre, Audibert Martine et Ridde Valéry (2017) « No-cost policies and unequal access to reproductive health services: The example of Caesarean sections in West Africa / Politiques de gratuité et inégalités d’accès aux services de santé reproductive : l’exemple de la césarienne en Afrique de l’Ouest » (communication orale), présenté à XXVIII International Population Conference/ XXVIIIe Congrès international de la population, Cape Town. https://iussp.confex.com/iussp/ipc2017/meetingapp.cgi/Paper/5886.


  • Schantz Clémence, de Loenzien Myriam, Goyet Sophie, Ravit Marion, Dancoisne Aurélien et Dumont Alexandre (2019) « How is women’s demand for caesarean section measured? A systematic literature review », éd. par Kelli K. Ryckman, PLOS ONE, 14 (3) (mars 6), p. e0213352. DOI : 10.1371/journal.pone.0213352. http://dx.plos.org/10.1371/journal.pone.0213352.
    Résumé : Background: Caesarean section rates are increasing worldwide, and since the 2000s, several researchers have investigated women’s demand for caesarean sections. Question: The aim of this article was to review and summarise published studies investigating caesarean section demand and to describe the methodologies, outcomes, country characteristics and country income levels in these studies. .Methods This is a systematic review of studies published between 2000 and 2017 in French and English that quantitatively measured women’s demand for caesarean sections. We carried out a systematic search using the Medline database in PubMed. Findings The search strategy identified 390 studies, 41 of which met the final inclusion criteria, representing a total sample of 3 774 458 women. We identified two different study designs, i.e., cross-sectional studies and prospective cohort studies, that are commonly used to measure social demand for caesarean sections. Two different types of outcomes were reported, i.e., the preferences of pregnant or non-pregnant women regarding the method of childbirth in the future and caesarean delivery following maternal request. No study measured demand for caesarean section during the childbirth process. All included studies were conducted in middle- (n = 24) and high-income countries (n = 17), and no study performed in a low-income country was found. Discussion Measuring caesarean section demand is challenging, and the structural violence leading to demand for caesarean section during childbirth while in the labour ward remains invisible. In addition, the caesarean section demand in low-income countries remains unclear due to the lack of studies conducted in these countries. Conclusion We recommend conducting prospective cohort studies to describe the social construction of caesarean section demand. We also recommend conducting studies in low-income countries because demand for caesarean sections in these countries is rarely investigated.


  • Schantz Clémence, Ravit Marion, Traoré Abou Bakary, Aboubakar Moufalilou, Goyet Sophie, de Loenzien Myriam et Dumont Alexandre (2018) « Why are caesarean section rates so high in facilities in Mali and Benin? », Sexual & Reproductive Healthcare, 16 (juin), p. 10-14. DOI : 10.1016/j.srhc.2018.01.001. http://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S1877575617303208.
    Résumé : Objective: To assess new estimates of caesarean section (c-section) rates in facilities in two sub-Saharan countries using the Robson classification. Methods: This study is a retrospective study. Workshops were organized in Mali and Benin in 2017 to train health care professionals in the use of the Robson classification. Nine health facilities in Mali and Benin were selected to participate in the study. Data for deliveries performed in 2014, 2015, and 2016 were included. Results: A total of 12,472 deliveries were included. The overall c-section rate was high in facilities in both countries: 31.0% in Mali and 43.9% in Benin. Women classified as high-risk (groups 6-10) were small relative contributors to the overall c-section rate (19.3% in Mali and 25.3% in Benin), while low-risk women (groups 1-4) were high relative contributors (55.4% in Mali and 45.2% in Benin). C-section rates in women who had undergone a previous c-section were especially high in both countries (84.0% in Mali; 82.5% in Benin). This group was the largest contributor to the overall c-section rates in both countries. Conclusions: We found high c-section rates in facilities in Mali and Benin, particularly for low-risk women and for women with a previous c-section. Further investigations should be carried out to understand why the c-section rates are so high in these facilities. Strategies must be implemented to avoid unnecessary c-sections, which potentially lead to further complications, particularly in countries with high fertility rates.
  • Schantz Clémence, Ravit Marion, Traoré Abou Bakary, Moufalilou Aboubacar, de Loenzien Myriam et Dumont Alexandre (2017) « Etat des lieux de la pratique contemporaine de la césarienne au Bénin et au Mali » présenté à 41e Journées Internationales, Lille, France.
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